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Drames et récits

L'enfant noir (1995)

Dans les années 90, à Kouroussa, une petite ville de Haute-Guinée, Baba Camara vit avec sa famille. Son père Madou est mécanicien. Monsieur Traoré, le marchand d'or, lui demande un taxi pour se rendre à Conakry, la capitale. Madou en profite pour lui confier Baba, qui doit être remis à son oncle Moussa grâce à qui il pourra aller dans une grande école. Un peu dans la précipitation, malgré la peine de sa maman mais avec l’accord des esprits consultés par le féticheur, Baba s’embarque pour la capitale. Là il va découvrir l’école autrement que dans la brousse mais aussi la violence de la ville, la maladie… et le premier amour.

En résumé

France-Guinée / 1995 / 1 h 32 min.

Réalisateur(s) : Laurent Chevallier

Acteur(s) :  Yaya Traoré, Baba Camara, Madou Camara...

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Laurent Chevallier, cinéaste voyageur
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L’Enfant noir est le premier roman de Camara Laye, publié à Paris en 1953. Très étudié dans les écoles africaines mais aussi françaises, ce texte est considéré comme l'un des écrits fondateurs de la littérature africaine contemporaine. C’est pourtant un français qui en a réalisé, quarante ans après, la première adaptation cinématographique… Mais avec une forte collaboration des Guinéens ! L’histoire de ce film est tout autant passionnante que le film lui-même…

On commence par un portrait du réalisateur, Laurent Chevallier. Il est né en 1955 à Paris mais toute sa famille est originaire des environs de Grenoble. Il va donc souvent à la montagne et devient un alpiniste expérimenté, ce qui lui donne l’envie de voyager et découvrir les grands espaces. Quand il fait ses études de cinéma à Paris, il s’intéresse tout particulièrement au cinéma documentaire, notamment aux pionniers, des aventuriers tels Robert Flaherty, réalisateur de Nanouk l’esquimau, un film de 1922 considéré comme l’un des premiers documentaires de long métrage. Après ses études, il démarre comme chef opérateur pour de grands cinéastes français puis est sollicité pour accompagner les tournages de films « extrêmes », notamment par son ami Nicolas Philibert, un autre documentariste célèbre. Avec lui il tourne des films en montagne, tels Christophe (1982), où il accompagne un alpiniste en solo dans l’ascension d’une montagne difficile des Alpes, accroché à des cordes dans la paroi verticale…. Puis il passe à la réalisation pour la télévision, pour des émissions d’aventure, d’exploration et toujours de montagne avec notamment l’alpiniste Patrick Berhault. En 1990 il réalise son premier long-métrage documentaire diffusé au cinéma. Le film s’appelle Au sud du sud et suit l’aventure de Jean-Louis Etienne dans les glaces de l’Antarctique.

Un habile mélange de fiction et de faits réels…
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Ainsi, bien qu’étant un film de fiction, le film est aussi un documentaire sur la famille Camara d’aujourd’hui et sur la vie d’un adolescent en Guinée. Grâce à son expérience de documentariste, Laurent Chevallier a su tirer profit de leur histoire personnelle pour la mêler à celle qu’il voulait raconter, inspirée par l’illustre ancêtre… Le tournage s’est fait exprès dans l’ordre des scènes car tout ce qu’il fallait faire vivre à Baba allait être pour lui une toute nouvelle expérience. En effet, comme dans le film, Baba n’avait jamais été à Conakry ! Donc quand il découvre la ville, il la découvre pour de vrai, de même pour la mer, l’école… Le second mariage de l’oncle Moussa n’était pas prévu dans le scénario de départ mais a dû être rajouté car sinon l’acteur n’aurait pas été disponible, il devait vraiment se marier ! C’est donc son mariage qui est filmé, et la mariée est sa seconde épouse réelle, authentiquement gendarme et membre du groupe des Sirènes de Guinée… Tout l’art du cinéaste a été de faire en sorte qu’on le remarque à peine !

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L’aventure africaine
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Mais c’est avec son deuxième long-métrage documentaire, Djembefola (1991), qu’il se fait vraiment remarquer du public et des critiques, gagnant de nombreux prix dans des festivals. C’est aussi le premier qu’il tourne en Guinée : il y suit le retour du percussionniste Mamadou Keita après 26 ans passés en Belgique. Laurent Chevallier tombe amoureux de ce pays - il y rencontrera même son épouse - et souhaite rapidement y tourner un autre film. Sa productrice, Béatrice Korc, propose alors d’adapter l’œuvre littéraire la plus connue de Guinée, L’enfant noir… Mais les responsables locaux ne sont pas d’accord car ils craignent que cette histoire ne donne une image vieillotte de leur pays ! Laurent Chevallier propose alors d’en reprendre le fonds, un récit initiatique, mais de le raconter dans la Guinée d’aujourd’hui. Le gouvernement guinéen accepte et finance même pour moitié le film. En contrepartie, le réalisateur devra tourner dans le pays et faire travailler des acteurs et techniciens locaux.

Laurent Chevallier part donc à Kouroussa, le village où est né et a vécu Camara Laye, pour repérer les lieux. Et il y découvre toute sa famille… En effet, si l’écrivain est décédé en 1980, nombre de ses frères vivent encore, à l’époque, dans son village natal. Tous s’enthousiasment pour le projet et veulent prendre leur part au film, voire le tourner eux-mêmes, estimant qu’un français ne peut comprendre cette histoire très africaine ! Pendant un an, avec beaucoup de patience et de respect, en impliquant un à un les membres de la famille, en s’engageant à apporter au village de nouveaux moyens de développement, Laurent Chevallier finit par convaincre la famille de Camara Laye de le laisser faire. Il recrute la plupart des acteurs parmi eux : l’acteur principal, Baba, est un neveu de Camara Laye, ses parents sont joués par un oncle et une tante. En revanche, l’oncle de Conakry, Moussa, est interprété par un ami de Laurent Chevallier.

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Le cinéma africain, un cinéma trop peu connu
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Bien que le cinéma existe depuis 1895, il ne s’est pas répandu très vite de manière équitable partout sur la planète… L’Afrique est ainsi le continent qui a mis le plus de temps à faire naître sa propre cinématographie, à cause notamment de la présence des colonisateurs (français, belges, portugais et autres) qui ne donnaient pas les moyens aux populations locales d’une vraie liberté artistique. Ce n’est donc qu’avec la décolonisation, après la Seconde Guerre Mondiale, que de vrais cinéastes africains apparaissent. La Guinée était une colonie française et a proclamé son indépendance en 1958. Malgré l’installation d’un régime autoritaire, le président Sékou Touré a tenu à développer la culture et son accès pour tous. Il a créé une agence nationale de cinéma, la Syli-Cinéma-Photo, dont l’objectif était de promouvoir les films guinéens à l’étranger. Une centaine de films ont été produits entre 1976 et 1984, date à laquelle le régime politique change. Mais ils ont eu beaucoup de mal à se faire connaître au-delà de leur pays…

On retrouve la même situation un peu partout en Afrique. Les quelques cinéastes connus sont issus de pays dont la stabilité politique est plutôt forte, comme le Sénégal ou le Burkina-Faso. Ce pays propose même dans sa capitale, Ouagadougou, le FESPACO, seul festival de cinéma africain de renommée internationale, qui se tient tous les deux ans depuis 1969 ! Aujourd’hui encore peu de films africains sont proposés sur nos écrans. La France soutient la production de films et certains parfois sont récompensés, tels Timbuktu d’Abderrhamane Sissako, vainqueur en 2014 du César du meilleur film… français, mais avant tout mauritanien ! Ainsi de nombreux producteurs, distributeurs ou cinéastes, comme Laurent Chevallier, se démènent pour les faire connaître.

A la médiathèque aussi, on propose pas mal de films africains en DVD, viens les découvrir !

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Camara Laye et Laurent Chevallier

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